Louise Desrenards on Wed, 5 Nov 2003 15:48:12 +0100 (CET)


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[nettime-fr] Ici sans doc ataché ! Jeudi 6 novembre, Paris: criticalsecret @ batofar/ On the Glass in the Screen...


Dans le cadre des programmations partenariales criticalsecret,
une soirée tous les deux mois au Batofar/ Lomitko :


---D-U---V-E-R-R-E---E-T---D-E---L-'-É-C-R-A-N---
---O-N---T-H-E---G-L-A-S-S---I-N---T-H-E---S-C-R-E-E-N---
   L'hyper-anamorphose :
Deux stratégies de la métonymie* par la vidéo numérique
chez Hikaru Fujii et Fabien Giraud.

    JEUDI 6 NOVEMBRE
    de 20h30 à 22h30


‹‹> B A T O F A R <‹‹

en bas, sur la rive gauche de la Seine
11 quai François Mauriacatof
75013 Paris

M° Bibiothèque François Mitterand, ligne 14
M° Quai de la gare, ligne 6

5 euros/3 euros TR

En plus des invitations respectives,
dix entées gratuites offertes par criticalsecret
aux premiers spectateurs qui se présenteront
à l'entrée en précisant cette revendication ;-)

Si problème, tél sur place :
Aliette Guibert
06 13 83 62 26





F A B I E N   G I R A U D  /  H I K A R U   F U J I I
De l'apparence à l'apparition / De l'entropie à la métonymie


Deux plasticiens, Hikaru Fujii et Fabien Giraud, proposent un champ multiple
construit autour de six oeuvres utilisant le médium vidéo. Ici, le spectacle
n'est pas tant à voir qu'à habiter physiquement, socialement et
politiquement. C'est que le visible et l'audible sont des actes dans un lieu
en partage. Ce lieu, c'est celui des rapports intimes et violents entre
image/son et spectateurs, lieu qui nous touche, nous accroche, nous dérange.
Là où il n'y a plus de place pour l'espace scénique.

Techno-Formalism, 2003, installation vidéo interactive collective (3D).
Design, 2003, vidéo interactive collective.
France (PSGOM version 3), 2002-2003, performance vidéo avec les spectateurs.
Français, 2003, vidéo expérimentale.
Émeute, 2003, documentaire.
Behaviourables and Futuribles, 2003, performance vidéo.


http://www;criticalsecret.com
http://www.batofar.net
http://www.lomitko.com

-------


     Ceci est-il encore de l'art ? Telle est la question qu'on pourrait se
poser à propos des stratégies plastiques qui convoquent notre attention
politique depuis un peu plus d'un an  : rigueur de l'ascèse, évidement
khénotique des corps, le signe de la remise en question primitive du monde
au-delà du concept ‹ mais encore?

    Dès l'opus 1 de criticalsecret, la question éthique de la représentation
réaliste de l'espace et de sa perception collective, conception
perspectiviste des points de fuite prescrivant la détermination de notre
engagement dans l'espace des projets, a cadré notre éducation d'occidentaux
jusqu'à la fin de la post-modernité. Ainsi, une philosophie politique de
l'art, confrontée à la position sociale et technique de la puissance et du
pouvoir, utiles à l'homme moderne et à sa gouvernance depuis la Renaissance,
a été envisagée notamment dans un article intitulé : « L'éthique de la
perspective chez Duchamp et Foucault », de Armand Biglari et Charles
T.Wolfe. 
    Ils y questionnent anachroniquement ‹ mais diachroniquement ‹ les deux
visions critiques de référence emblématique, une stratégie artistique et une
stratégie philosophique, en ce qu'elles pourraient introduire ou résumer la
naissance comme la perte des repères du monde, quand voguant vers son
changement celui-ci déplace, bouleverse, ou abolit les positions ou les
rôles sociaux du singulier au collectif (ici, à l'orée de la société
mondiale). Leur analyse constitue une approche sur le sens commun du regard
et son apprentissage selon, au fil de l'histoire des sociétés et de leur
art.
http://www.criticalsecret.com/n1/awolfe/01.htm

    Sous ce jour, si la perspective à un ou "n" points de fuite est
structurée ou déstructurée par des lignes de la composition et des plans de
la couleur ou / et de la lumière, ou même par un jeu fictif sur la
définition, ‹ ce coefficient de netteté que l'on appelait justement "faire
le point" en matière d'objectif photographique ou cinématographique ‹ des
premiers plans à la profondeur de champ, dans les représentations stables
(peinture, photographie), comme par le mouvement dans les représentations
instables (cinéma, vidéo) : alors nous devions doublement nous intéresser
aux travaux critiques de la vision chez Hikaru Fujii, ses travaux d'effets
numériques déstructurant la représentation perspectiviste dans une violence
directement infligée aux images sous notre regard, mais plus encore, dès sa
première installation interactive de vidéo numérique sonore, avec captation
désincarnant le public, dans une hyper-anamorphose interactive réalisant en
direct l'intégration du regardant dans la scène de la vision.
    Cette désincarnation du public, par évidement matériel de l'apparence de
ses individus captée pour l'écran, suppose bien que ces derniers devraient
nécessairement s'y reconnaître ou y reconnaître leur emprunte comme sujet
propre de cette ¦uvre critique (et non en perdre conscience, dans le
déplacement de leur énergie appliquée à d'autres objets que le leur, à
l'instar de nombre d'¦uvres actuelles instrumentant des capteurs).
                   
    Telles les diverses temporalités et topologies matérielles et virtuelles
de l'¦uvre de Fabien Giraud, cinéaste et vidéaste documentariste qui nous
saisit en citoyen critique, nous ne pouvions davantage en éviter la scène
paradoxale, qui initie les protagonistes de son enquête depuis leur
interview jusqu'à ce qu'ils s'auto-regardent. En même temps, ils sont
plusieurs substitués les uns après les autres dans le siège qui les assied,
décor jouant dans la scène vue à l'écran dans le cadre d'une installation
interactive sur le site même, avant qu'il nous en soit livré ultérieurement
des traces différées...
    Dès ses premiers enregistrements et sa première installation aux Indes,
à la suite de l'émeute émeute meurtrière et des tueries qui durèrent deux
mois en 2002, entre les communautés Hindouiste et Musulmane, sur le site
même à Ahmedabad, État du Gujarât, il entreprend une traversée radicale de
la transparence du documentaire et du reportage poussés à leur paroxysme,
dans une mise en scène réfléchissante, de l'apparence à l'apparition,
jusqu'à une révélation sociale critique.
    La construction plastique organise les postures et les miroirs comme
proposant une phénoménologie des discours et du regard, à penser par les
protagonistes historiques de l'événement eux-mêmes, dans une distance de
leur point de vue grâce à leur statut circonstanciel d'acteurs.
    Le décor providentiel est un siège installant leur existence
participative. 
    Le redoublement de l'écran, qui réfléchit les accessoires de la scène,
installe tout acteur (donc respectivement et réciproquement tous les
protagonistes objets de la même enquête) dans une scène commune citoyenne,
fictive, qui abolissant la division communautaire rend l'écoute
intercommunautoire et critique réellement tolérable, au-delà à des atrocités
et des cruautés subis ou commis.
    Dialogue par défaut de lui-même dans une stratégie artistique à
plusieurs niveaux de reportage et de documentaire, qui contracte dans son
actualité active avec l'histoire des conflits évoqués, celle de l'esthétique
et de l'évolution formelle de ces genres, dans un destin ouvert.

    Lorsque Hikaru Fujii utilise un capteur ou une caméra qui nous regarde
et nous montre en temps réel, pendant que nous sommes à la fois des acteurs
et les spectateurs, ce n'est pas notre corps qu'il intègre mais la
représentation de notre corps qu'il déplace. Depuis notre conception
matérialiste, édifiée par notre conscience substantielle in situ, jusqu'à
son abstraction de toute chair dans l'iconographie naturaliste qui en
résulte à l'écran, se manifeste notre apparence comme corps critique à nos
yeux, tandis que nous nous sentons désintégrés sur place.
    D'ailleurs, cette image de notre corps désincarné est si écartée de la
cognition de notre présence simultanée dans le public, que nous ne
l'identifions pas immédiatement parmi les fragments qui animent l'écran àet
notre regard ; nous n'identifions pas davantage le reportage de
l'environnement dans lequel nous nous trouvons : quand bien même nous
serions prévenus, la découverte est progressive.
    Car notre intégration / désintégration ne s'exécute pas simplement dans
le saisissement de notre aspect physique matériel et sa réapparition
virtuelle en image, telle l'opération progressive de "l'invention de Morel"
que la caméra placée par Hikaru pourrait rappeler à notre mémoire, ni dans
la médiation d'une vitesse relative ou différée de l'opération, ni davantage
sous la dissociation de notre double perception de l'événement ubique. C'est
l'environnement d'un document préalable, inaugural, filmé et réalisé par
l'artiste auparavant et dont l'événement se réduit peu à peu sous l'effet
d'un montage parallèle, qui installe en direct l'image de notre corps
désincarné et de son environnement dématérialisé.
    Ce montage-même en temps réel, est animé "cut" par l'artiste qui
improvise la partition depuis une console numérique ou un ordinateur, selon
les circonstances de la salle et du public... Ainsi, l'image captée se
substitue à l'image pré-enregistrée, alternativement mais extensivement en
durée, puis, absolue réversibilité des composantes, finit par régner seule à
l'écran.
    Ici se réalise, non pas l'intégration du regardant dans le paysage de
l'anamorphose sinon métaphoriquement, puisque c'est seulement l'image de
notre corps évidé de sa matière (l'image du corps capté par le numérique est
donc un corps khenotique) qui apparaît à l'écran, mais une réalisation
constitutionnelle, organique, de l'entropie du virtuel para-matériellement,
à travers la figure d'une métonymie réellement effectuée : la substitution
de l'image en direct par élision de l'image pré-enregistrée.
    En même temps, dans cette distance de la figure de style qui progresse
par opposition brutale sans effet spécial, sinon structuré par le progrès
notre propre perception cognitive du phénomène,  il s'agit d'une révélation
critique des publics respectifs des scènes comparées, deux par opposition
radicale, celles du film préalable et de la situation intégrée, et une
troisième distanciée : ce lieu d'où nous percevons et interprétons les deux
autres.
    Enfin, par la confrontation simultanée des différentes sphères de la
perception du corps, il pose la question philosophique du changement de lieu
de temps donc de sens du projet d'art, depuis le monde technique jusqu'au
monde numérique et sans le résoudre, donne à expérimenter une qualité de ce
changement.
    Par là, il cite les différentes échelles par lesquelles l'histoire de
l'art moderne se représente et disparaît, dans une scène édifiante du regard
et de son objet jusqu'à nos jours.
    Au fond, tous les projets de Hikaru Fujii que nous avons pu découvrir
jusqu'ici, qu'ils fassent apparaître ou disparaître des sujets, relèvent la
mise en abîme du corps matériel par le corps khénotique, et le décadrant
sous l'effet de la métonymie, réalisent le corps propre de l'oeuvre
elle-même dans l'événement de son entropie, toujours aléatoire.

    Ces deux artistes révèlent et jouent de l'événement à la limite du
secret existentiel et de l'illusion matérialiste.

Aliette Guibert-Certhoux



N.B.
Sur Hikaru Fujii / Fabien Giraud
Entropie et métonymie/ de l'apparence à l'apparition
AUTRES REPÈRES (non exhaustifs des idées présentées) :


    L'entropie est inscrite dans le second principe de la thermodynamique,
c'est la para-production de chaleur, en principe inutile, à l'objet du
déplacement d'un corps.

‹> Ici la cognition mieux que la chaleur elle-même (en réalité l'artiste
refroidit notre corps) telle est  la proposition phénoménologique d'une
oeuvre d'art.

* Métonymie (figure du discours qui peut contenir toutes les autres)
:transposition, ou changement de nom, un nom pour un autre...

‹> Ici nous parlerons non de mots ni de noms mais de matière d'objets d'art
et du corps.

« Ce que Freud a désigné comme " plasticité du matériel verbal ", Lacan
l¹interprète en tant que " perméabilité de la chaîne signifiante aux effets
de métaphore et de métonymie ». (Pierre Kauffman)

« La structure métonymique, c'est la connexion du signifiant au signifiant,
qui permet l'élision par quoi le signifiant installe le manque de l'être,
dans la relation d'objet. (...)
Le signe  de la métonymie marque l'irréductibilité où se constitue, dans les
rapports du signifiant au signifié, la résistance de la signification.(...)
»(Lacan, Écrits, 66a et b, Le Seuil, 1966.


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